jeudi 10 avril 2008

Que restera-t-il ?

Que nous restera-t-il, après la mort, de nos possessions en ce monde ? Rien ! Le dicton populaire le rappelle: "Il ne l'emportera pas avec lui dans sa tombe !". De notre avoir en ce monde, il ne restera rien dans l'autre.

Les biens de ce monde ne sont pas éternels. Et même s'ils l'étaient, la jouissance que nous pourrions en avoir ne dépasserait pas quelques décades. C'est déjà pas mal ! Assez pour s'y attacher. Mais on peut penser que le détachement est beaucoup plus facile quand, à la veille de mourir, ils deviennent inutiles. Que ferions-nous de tout cela dans le "Royaume des Cieux" ? Là, ils n'ont plus cours. Le filtre de la "porte étroite" ne laisse passer que notre être essentiel: la personne spirituelle et indestructible. (1)

Après la mort biologique, libre de tout avoir, la personne spirituelle est invitée à entrer dans le monde d'en haut où elle poursuit sa vie nouvelle en dépendance de sa Source qui lui donne l'être et la préserve du néant. Ce néant qu'on appréhende à la disparition du corps physique. D'après la révélation, la persone conserve aussi, (mais ce n'est pas un avoir !) son réseau de relations établies en cette vie. Et sans doute, s'en ajoutent beaucoup d'autres que je ne saurais préciser. Ainsi, nous sommes en attente du "Royaume des Cieux". En termes religieux, on appelle cela l'espérance. C'est l'entrée dans l'unité parfaite d'une communauté spirituelle "où tout ensemble ne fait qu'un"(2). Unité parfaite de la multitude, unité possible parce qu'alors purifiée de ses scories. Plus d'ego égoïste ! Ni sa suite de conséquences facheuses ! Tout se donne et se reçoit dans une gratuité totale, propre de l'Être divin.

Si dans ce monde de l'avoir et de la non-gratuité, et à cause de cela, nous ne pouvons encore pas vivre cette unité souhaitée, faut-il "se départir de tout ce que nous avons pour qu'il ne reste que ce que nous sommes" ? (3). Si mon avoir en ce monde ne me sert à rien dans le Royaume des Cieux, ici-bas il m'est encore fort utile ! Nous en avons bien conscience, d'où son attrait. Vais-je donc essayer d'en rattraper le plus possible ? Nous sommes en tension entre deux mondes; ce n'est pas toujours très confortable: l'un tire vers le haut, l'autre vers le bas ! Mais, si je comprends bien, je n'ai rien à laisser, ni à dédaigner. Je peux même, d'une certaine façon, jouir de tout. Je veux dire: Je ne peux pas avoir "deux maîtres ... Servir Dieu et l'argent" (4). Saint Paul dira: "Posséder comme ne possédant pas", sans mettre mon coeur dans mon avoir. "Là où est ton trésor, là aussi sera ton coeur" (5)

Faire un bon usage des choses, serait-ce donc: "Rechercher d'abord le Royaume de Dieu et sa justice, et tout le reste vous sera donné par surcroît." (6); "Manger pour vivre et non vivre pour manger"; "Ne rechercher ni richesse ni pauvreté, mais ce qui est nécessaire pour vivre"; "À quoi cela te sert de conquérir le monde, si tu viens à perdre ton âme ?". Et puis, partager: "Si tu vois ton frère dans le besoin ...". Le monde politique prend conscience actuellement que la justice distributive est essentielle au maintien de la paix dans le monde. Partager pour avoir la paix ? Mais c'est encore intéressé ! L'amour pur existe-t-il vraiment ? Fénelon le prétendait, mais avait-il raison ? (7)

(1) La personne spirituelle, par opposition au "personnage" notre être corporel mortel, lié à ce monde, et qui y exerce un rôle auquel il ne doit pas s'identifier.
(2) Psaume 121(122), 3
(3) Selon Y. Girard
(4) Matthieu 6, 24
(5) Matthieu 6,21
(6) Matthieu 6, 32
(7) Fénelon, évêque théologien du XVIII siècle, en controverse avec Bossuet à ce sujet. On se demandait alors si l'amour désintéressé était possible ? Et quel était son rapport avec l'amour de soi qui est à la base de toutes nos inclinations naturelles ?

3 Comments:

Anonymous Anonyme said...

*Nous sommes en tension entre deux mondes*

Nous sommes toujours partagés entre le matériel et le spirituel : «Homme à l'âme partagée» (Saint-Jacques, 1, 8).

6:43 PM  
Blogger michel said...

Pour Omega 3:
C'est sans doute une bonne chose que cette tension qui nous oblige à faire des choix. C'est en exerçant ainsi notre liberté qu'on affermit le coeur "vers les choses d'en haut", ou encore vers celles d'en bas ... Efforçons-nous de faire les meilleurs choix. L'expérience d'un mauvais choix, par ses effets, devrait nous indiquer que nous sommes dans l'erreur. C'est une façon d'être guidé "à postériori".

10:51 AM  
Anonymous Anonyme said...

Dac !

5:20 PM  

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