samedi 28 mars 2009

Perdre son âme !

"Que sert à l'homme de gagner l'univers, s'il vient à perdre son âme ?" (Autres traductions: s'il ruine sa propre vie; s'il le paie de sa vie; etc.) Cf. Évangile de Saint Marc 8, 36.

Sous ces mots "gagner l'univers", nous pouvons aussi comprendre: conquérir l'espace et s'en rendre maître, chercher la domination, l'autorité et la convoitise sous toutes ses formes, le désir de s'enrichir au-delà de nos besoins, toujours posséder plus, etc. La liste serait longue !

Pour quelqu'un qui croit à l'éternité, la réponse à la question ne fait pas de doute. Sur le plateau de la balance, un bien éternel pèse infiniment plus qu'un bien temporel, alléchant peut-être, mais qui a sa finitude. Ici, l'univers périssable est sans commune mesure avec ce qui, en nous, a valeur d'éternité.

Deux choses m'interpellent:
1. Il serait donc possible de perdre son âme ?
2. Que signifie perdre son âme, ou ruiner sa propre vie ?

Après avoir parlé (21 mars 09) de la gratuité du salut (salut signifiant: ne pas perdre son âme)voici maintenant que ce salut nous est présenté comme pouvant nous échapper. Donc, bien que gratuit et universel, (pour tous) nous pouvons le perdre ? Terrible perspective ! Nous retombons dans la pédagogie de la peur dont une théologie de l'amour inconditionnel nous avait pourtant éloigné.

Qu'est-ce donc que "perdre son âme" ? Serait-ce la mort de notre identité profonde, de notre être essentiel ? La mort de notre "Personne", désignée par un "Je" ? De mon être intime, que je regardais pourtant comme immortel ? Comment peut-il s'éteindre et disparaître ? La question, posée par le Christ lui-même, nous laisserait pressentir cette possibilité.

Nous le savons par expérience : notre être visible et corporel, l'individu que nous sommes, s'exprimant dans la société selon ses fonctions diverses, est appelé à disparaître par la mort biologique. Personne n'en doute. Tout cela n'est que la face visible et existentielle de ce "Je" invisible, et dont nous sommes bien conscients.

Mais "perdre son âme", ne concerne plus la même réalité. Serait-ce autre chose, pour "l'âme", que tomber dans la mort du néant ? À vrai dire, je ne me sens pas très compétent, pour disserter sur ces notions. Ni très enclin, d'autant plus qu'elles ne sont pas de nature apaisantes ! Je ne m'en préoccupe d'ailleurs pas trop, étant sûr que Celui qui donne la vie éternelle ne s'appuie nullement sur les mérites d'une conduite morale : il n'y a pas de monnaie d'échange en retour du don de Dieu. Ce qui me vaut de ne pas en porter inutilement le poids.

Cependant, sachant que la raison ne peut me satisfaire dans sa recherche, je dois m'appliquer à la soumettre à une intelligence qui lui est supérieure: celle du coeur. D'où la grande place que peut tenir le regard de foi dans la confiance totale. J'ai le sentiment que la meilleure façon de répondre au don de la vie éternelle c'est bien d'entrer ainsi dans le Mystère (1) avec la quiétude que cela apporte. Le reste ira de soi !

Voici un lien où nous pouvons trouver matière à réflexion :
http://bibliquest.org/HardtM/HardtM-Vie_Eternelle.htm

(1) Ce mot "Mystère" ici, ne signifie pas tellement ce qui est impénétrable à la raison. Il va au-delà, et prend un sens plus positif, signifiant : ce qui nous est révélé au sujet de ce qu'on ne peut pas connaître autrement.