samedi 11 octobre 2008

Tous et chacun

Dieu a un regard particulier pour chacun d'entre nous. Regard apparemment différent, semble-t-il, du regard plus distant et moins intime qu'il a pour tous. C'est du moins ainsi que je perçois le comportement de Dieu, dans sa relation avec ses amis.

Nous trouvons dans la bible de terribles menaces de la part de Dieu. Est-ce possible ? Si nous les prenons à la lettre, elles ont de quoi nous faire trembler de peur, et nous transformer en esclaves. L'art religieux des siècles passés a bien su les exploiter avec ses terribles scènes d'enfer. Des générations ont vécu dans la peur de Dieu, au point que beaucoup, marqués par ces images, sont devenus aujourd'hui incapables de se faire à l'idée que Dieu est essentiellement Amour, qu'il nous aime vraiment et veut notre bonheur éternel. Il faut changer cette mentalité et supprimer cette contradiction.

Nous savons bien que Dieu avait affaire à un "peuple à la nuque raide", pas très doux, ni très docile (ce qui peut encore arriver aujourd'hui ! ). Mais qu'il est difficile de se défaire de tant de menaces pour faire prévaloir son message d'espérance, et en vivre vraiment. On trouve encore bien des échappatoires à l'amour inconditionnel, en ayant recours à la justice divine comme à un besoin de punition, si ce n'est de vengeance. Quelle projection !

L'amour de Dieu reste encore pour beaucoup de croyants une connaissance théorique. Connaissance qui a un point d'appui solide dans la bible, malgré les airs courroucés du Dieu biblique. Mais nous n'arrivons pas à nous défaire du langage justicier, celui de la récompense-punition. De nombreux croyants vivent plus comme les esclaves d'un Dieu trop exigeant et dur, plutôt qu'en enfants bien-aimés. "Difficile pour un esclave de s'habituer à vivre en pleine liberté !". Il faut du temps pour se libérer du besoin de soumission servile. Il faut aussi l'expérience de l'intimité du Maître qui devient un ami.

Esclaves de Dieu nous le sommes d'une certaine façon, non de son pouvoir autoritaire, mais de son amour. Cet 'esclavage' salutaire est une dépendance qui mène à la libération. Dépendance qui fait de nous des maîtres et des amis. Oublions donc ces images des siècles passés. "Elles font de notre Dieu Amour ce qu'il n'est pas: un Dieu externe qui n'est qu'une allégorie des rois terrestres, et rien d'autre" (1). Le Christ ne disait-il pas: "Je ne vous appellerai plus serviteurs, mais amis !" . Voilà le langage qu'il a pour "chacun", celui d'un ami.

Par contre le regard que Dieu a pour "tous", est un regard qui semble moins personnel, d'une exigence moins nuancée. Tandis que celui qu'il a pour chacun est adapté, fait de bienveillance et de compréhension. Adapté à notre expérience individuelle, à notre intelligence, comme nous le ferions avec des enfants qui ne savent pas encore grand-chose. Façon de parler, bien sûr, car il n'a pas deux regards !

Sujet inépuisable ! À "chacun" de le méditer et d'en tirer la nourriture qui lui convient. Et à "tous" de s'efforcer de vivre en ami, comme si nous étions seuls avec Dieu. Bon moyen de former une communauté solide !

Sur l'amour en nous, voir: http://www.catechese.viateurs.ca/spiritualite/trinite-divine-2/index.cfm

(1) Alexandre Turincev, dans "Dieu est vivant" (Catéchèse orthodoxe) p. 430; Cerf.