mercredi 24 octobre 2007

Accommodements raisonnables

Nous voyons actuellement au Québec, comme ailleurs sans doute, un grand mouvement de réflexion au sujet des "accommodements raisonnables". Comment intégrer dans notre milieu social les étrangers, de plus en plus nombreux, qui vivent de traditions et de mentalité différentes ?

Hier soir, la commission Bouchard-Taylord, mandatée par le gouvernement pour consulter les citoyens à travers la Province du Québec, donnait aux gens de la région de Trois Rivières, l'occasion de s'exprimer librement à ce sujet. Dans les nombreux témoignages que j'ai pu entendre à la TV, j'ai pu discerner deux tendances: d'un côté ceux qui ne veulent pas perdre leurs racines et leurs traditions devant l'affluence étrangère, mais accueillants tout de même. De l'autre ceux qui, voulant faire preuve de grande ouverture, seraient prêts à faire disparaître tout ce qui caractérise traditionnellement l'identité québécoise, et les signes de distinction, surtout les signes religieux; la religion étant souvent perçue comme la cause de tous les maux. Quelle chance de pouvoir échanger ainsi sur tant de divergences qui dérangent !

La tolérance existe en général. Dans une société pluraliste, tant qu'elle ne dépasse pas certaines limites, elle reste constructive . Même si la tolérance n'est pas en soi la situation idéale (mieux vaudrait être tous sur la même longueur d'onde !) il est bon de la cultiver, en veillant à la rendre ni trop raide, ni trop laxiste.

À cette recherche commune des limites acceptables de la tolérance, chacun doit y travailler, mais dans la confiance, en excluant la peur. Car en tout être humain, il y a une réalité spirituelle commune. C'est sur ce point commun, dont nous devrions avoir conscience, que se fonde la confiance d'une réussite finale.

Ce point commun, réalité spirituelle et transcendante, travaille pour nous, mais pas sans nous. La religion véritable ne commence-t-elle pas là d'abord ? Et ça s'appelle l'amour. Mais Gilles Vigneault nous l'a bien rappelé (en chantant, ça passe mieux !): "Qu'il est difficile d'aimer !"

vendredi 12 octobre 2007

Dépendance

Sujet intéressant, bien que déjà abordé (1). Je viens de lire: "Quand on est une créature, on est une dépendance certifiée et garantie pour l'éternité. Être créé, c'est avoir besoin de Dieu", c'est-à-dire de Celui qui nous a créés.

Peut-il en être autrement ? On peut ne pas avoir conscience de cette dépendance. En termes un peu commerciaux, elle est qualifiée ici de "certifiée et garantie pour l'éternité". La relation avec notre origine peut être occultée, pas évidente pour tout le monde. Le besoin de Dieu également n'est pas ressenti par tous. L'éducation et l'influence du milieu contribuent sans doute à ce sentiment. Mais, à mon avis, il existe au moins virtuellement en chacun de nous. En n'en ayant pas conscience, on perd là une cause radicale de bonheur et de sérénité. En tant que créatures, notre richesse est dans cette dépendance consciente de notre Source, d'où nous viennent l'être et la vie. Dépendance qui nous rend libres.

Comment une dépendance peut-elle rendre libre ? Ordinairement c'est plutôt le contraire ! Libération de le classe dirigeante trop autoritaire, du pouvoir du capitalisme, du pouvoir parental, de la drogue et des passions, etc. Y aurait-il un esclavage qui libère ?

En ce qui concerne la créature envers son créateur, il faut sortir de ces images de dépendance fournies par notre monde. Ce qui est ici une faiblesse, est là une force, un enrichissement. Bien des choses nous paraissent erronées ou injustes quand on les évalue selon nos critères. On conçoit souvent la justice comme l'égale répartition des biens, mais des penseurs affirment que c'est une conception simpliste. Même Dieu a ses "chouchous" ! Allez voir pourquoi ?

Remarquons qu' à cette apparente injustice, ou à ce favoritisme, s'allient l'amour, la compassion et la patience de la tendresse (c'est bien ce que nous fait connaître la révélation !) alors, il faut bien admettre qu'on ne peut pas s'en tenir uniquement à ce que notre raison peut comprendre. Ce serait se priver de richesses insoupçonnées et se contenter de peu. Ainsi la dépendance de la Source libère.

Voilà comment je peux justifier et louer cette affirmation de départ: "Quand on est une créature, on est une dépendance certifiée et garantie pour l'éternité". J'y ai ajouté cette idée de bonheur. Dommage que tout le monde ne connaisse pas ce bonheur ! Le monde, me semble-t-il, serait différent.

(1) Cf. "Maître et esclave" sur ce blogue, au 10 juillet 2006

samedi 6 octobre 2007

Le temps: un ami ?

Je ne peux pas échapper au temps. Il est mon compagnon depuis ma naissance, et je ne peux pas concevoir ma vie hors du temps. Pourtant, je sais que la mort m'en fera sortir; et je continuerai à vivre sans lui, d'une façon différente, inimaginable. Tant d'êtres chers, bien connus, sont maintenant dans ce "hors du temps".

Ma naissance m'a fait entrer dans le temps. La mort m'en fera sortir. En attendant, c'est le temps qui me fait vieillir. Jusqu'à un certain âge, vieillir est un avantage, permet à l'enfant d'atteindre le maturité, d'être plus fort. Mais plus tard, après la cinquantaine, le temps conduit inévitablement à un déclin, celui de la vieillesse. Dois-je pour cela le considérer comme un ennemi ?

Je ne peux guère lutter contre le temps. En voulant trop le maîtriser, je risque d'en faire un ennemi. Alors que faire ? Simplement me laisse couler dans le temps, comme je me laisserais emporter, sans effort, par le courant d'une rivière.

Cet automne, avec mon épouse, notre fils et sa conjointe, nous avons descendu la rivière Saint-Maurice en kayak, du barrage de "La Gabelle" jusqu'à Trois-Rivières. Pendant près de trois heures, nous nous sommes abandonnés agréablement au courant, passant quelques rapides, évitant les rochers; tout cela dans un décor magnifique. Quelques surprises: une île, un remous, une bizarrerie sur les rives sauvages.

Ainsi, me semble-t-il, doit être vécu le temps: au présent, sans s'y opposer, sans chercher à en remonter le courant, en accueillant les surprises et les remous. Alors, sur la pente descendante, en vieillissant, il continue d'être un ami. Bon gré, mal gré, je suis acculé à en faire un ami. Sinon, je vais le maudire; la pire des choses !

J'ai déjà entendu dire: "On passe la première partie de sa vie à envier la seconde, et la seconde à regretter la première". Ce n'est pas une bonne philosophie. Nous pouvons être tenté de regretter le temps de la jeunesse, mais attention, pas trop ! Nous ne devons pas entrer dans la vieillesse à reculons, en s'accrochant au passé. Il y a une pente descendante irréversible. Utilisons-la pour prendre notre élan afin de mieux sortir du temps. Mais, quand ce sera le temps ! En suivant le rythme du courant, je me sens ni pressé, ni anxieux d'aller trop vite; bien qu'en fait, vers la fin de la vie, le courant semble vraiment plus rapide !

Le temps est un ami, mais par le présent. C'est mon lien avec l'éternité. Je dois apprendre à ne pas le couper, sinon je risque de ne pas savoir mourir. Mais vouloir bien mourir, c'est encore une inquiétude inutile ! Au moment de faire le saut en dehors du temps, alors le pont se présentera. Je ne dois même pas dire: on verra ! Des milliards d'humains ont su faire ce passage avant moi, pourquoi ne le saurais-je pas moi aussi ?