dimanche 28 septembre 2008

Convergences secrètes

Qu'il serait agréable de sentir que nous avons tous les mêmes convictions, et que nous marchons tous vers un même but. Plus de divergences ! Bien sûr, les amateurs de débats animés trouveraient cela un peu monotone ... Où trouver une raison de dispute ?

Et si nos divergences n'étaient, quant à l'essentiel, qu'apparentes ? Ne pourrions-nous pas, dans notre monde si pluraliste, trouver des convergences secrètes ? Cachées au fond des coeurs, elles seraient comme un axe commun qui nous orienterait vers Dieu.

Je me souviens avoir lu une petite anecdote de Jean Guitton, ce célèbre philosophe chrétien. Son épouse lui disait qu'elle priait telle sainte. Et lui, de répondre: "Mais voyons, Louise, elle n'a jamais existée - Peu importe, réplique Louise, je suis sûre que Dieu peut se servir d'elle pour m'élever vers lui". Belle réponse. Ici, l'axe commun, est bien ce désir du coeur de chacun, de s'élever plus haut, à partir d'un moyen qui nous accroche, même s'il peut paraître ridicule aux yeux des autres.

Cela voudrait-il dire, pour Louise (comme pour moi, et bien d'autres) que tout ce que nous utilisons comme intermédiaire entre le Ciel et nous, peut vraiment nous élever, indépendamment de leur réalité objective ? "Qu'il te soit fait selon ta foi !" (1). Que ce soit cette sainte supposée inexistante; ou cette relique, authentique ou non, mais que je prends dans mes mains lors d'un besoin de secours ou d'un doute; ou encore cet ange protecteur auquel je crois (même s'il ne devait pas exister); et cette musique, ce tableau inspirant ou toute forme d'art authentique; également un pèlerinage à tel lieu que je considère comme sacré et qui me recueille, ou relié à un ancêtre; et ce magnifique coucher de soleil ou toute merveille de la nature, etc.

Toute religion, même imparfaite (en elle-même, dans ses membres ou son clergé), pourquoi ne serait-elle pas pour ceux qui y adhèrent sincèrement, un moyen efficace d'élévation vers les plus hautes réalités spirituelles et la fraternité ?

Il y a là quelque chose qui est en train de se réaliser dans notre monde d'aujourd'hui. Intéressant, en un temps où les moyens traditionnels des générations passées ont moins la cote.
Quelqu'un me disait, dans un langage familier: " le gars d'en-haut, sait ce qu'il fait". Oui, en bon pédagogue, il sait tirer la bonne corde !

Pourquoi vouloir absolument que tout le monde prenne le même ascenseur ? Oublions un certain dogmatisme qui voudrait nous placer d'emblée sur la bonne voie. Fidèle dans ma recherche sincère, si je suis dans l'erreur, je peux en sortir dans un moment de grâce. Il me semble qu'il arrive toujours en son temps. Vouloir sortir quelqu'un de l'erreur avant le temps est dangereux. C'est ainsi qu'on en est arrivé aux bûchers. Et il peut y avoir bien des formes de bûchers modernes, sans flammes de feu, mais verbales, cause de marginalisations et de révoltes.

Tout en m'affermissant dans ma propre foi et en y progressant, je dois savoir aussi inclure dans le Royaume de Dieu, tout mes frères et soeurs qui cherchent, et que Dieu aime autant que moi sinon plus. Il fait briller son soleil et pleuvoir sur tous, lisons-nous dans l'évangile. Le dialogue respectueux, sans prosélytisme, ne peut qu'affermir la compréhension mutuelle, le progrès commun, et le sentiment de fraternité.

(1) Matthieu 9, 21 et 29

dimanche 21 septembre 2008

Un monde ouvert sur l'infini

Ne restons pas enfermés dans les frontières de ce monde: un "espace" infini nous est réservé. Bien différent de cet espace cosmique que la science nous fait découvrir avec ses puissants télescopes. Bien qu'elle ait aussi réussi à nous envoyer vers d'autres planètes, ce ne sont pas ces escapades d'astronautes, aussi géniales soient-elles, qui nous feront découvrir l'espace infini pour lequel nous sommes nés.

Nous sommes nés sur cette terre à la suite d'une lignée d'ancêtres qui nous devancent dans un monde nouveau. Quand les rejoindrons-nous ? Peu importe. Le temps, si précieux pour nous, compte peu pour eux, hors du temps. Par nos liens avec ceux qui nous ont précédés, nous ne sommes pas complètement étrangers à ce monde nouveau. Ce n'est sans doute pas pour rien que beaucoup se passionnent pour la généalogie ! Par la foi, nous sommes en communion avec eux et déjà reliés à notre demeure éternelle.

Tout un monde spirituel, hors espace temps, nous est destiné. Et, dès maintenant, il est comme imbriqué dans notre monde et donne une orientation définitive à notre vie. Ce qui ne nous empêche pas de garder les pieds bien sur terre où nous avons nos racines. Mais notre coeur, trop souvent partagé, ne devrait pas s'y fixer entièrement. "Tu nous a fait pour Toi, et notre coeur est inquiet tant qu'il ne repose pas en Toi" écrivait saint Augustin.

De toute façon, bon gré, mal gré, ne devrons-nous pas quitter cette terre ? Et bien autrement qu'en navette spatiale ! Départ sans retour; d'où les déchirements compréhensibles pour ceux qui restent. Pour nous aider, ne pourrions-nous pas voir la mort pour ce qu'elle est: un passage vers la vie éternelle ?

dimanche 14 septembre 2008

Gaspillage, ou profusion ?

Dans notre société moderne où l'économie et l'argent ont tant d'importance, que penser du gaspillage du Créateur dans sa création ? Par exemple: les fleurs des bois et des champs. On dit que, à travers nous, la création loue la grandeur de son Créateur. Mais voilà, s'il n'y a personne pour les regarder ? Des milliers de fleurs et autres belles choses, dans les forêts vierges, les régions désertiques, les grottes inexplorées, n'ont jamais été vues et ne le seront jamais.

Que penser d'un Michel-Ange, d'un Rembrandt, ou autre artiste célèbre, cachant quantité d'oeuvres splendides qui, finalement seraient détruites par le temps sans jamais avoir été admirées ! C'est bien ce que le Créateur fait. Gaspillage dû à son inépuisable fécondité.

Faut-il nécessairement que les oeuvres du Créateur soient vues pour qu'il en soit loué ? Sans doute pas. Cette surabondance ajoute à sa grandeur. Si toutefois il était possible d'ajouter quelque chose à qui il ne manque rien. Nous pouvons aussi l'applaudir sans crainte ! À la différence de ses créatures humaines qui, devant des actions qui méritent des éloges, doivent se faire dire: "Quand tu fais l'aumône, ne va pas le claironner devant toi; ainsi font les hypocrites ....afin d'être honorés des hommes ... Quand tu pries, retire-toi dans ta chambre ... et prie ton Père qui est là, dans le secret ... Quand vous jeûnez, ne vous donnez pas un air sombre ... pour qu'on voie bien que vous jeûnez ... ton Père qui voit dans le secret te le rendra". (1)

Il est bon pour nous d'entendre ces paroles. C'est tellement dans notre nature de vouloir être loué. Alors, nous sommes bien pardonnables ! Bien sûr, il y a une façon "louable" de recevoir la louange: la recevoir sans qu'elle ait été recherchée ! Quantité d'actions louables sont d'ailleurs accomplies dans le secret autour de nous . Tout comme les fleurs cachées à nos regards, leurs actes tenus secrets louent Dieu tout autant, et probablement plus que d'autres accomplis en plein jour, aux yeux de tous !

(1) Matthieu 6, 1-6 et 16-18

dimanche 7 septembre 2008

Une mutation de l'humanité ?

De nos jours, "la foi et les valeurs spirituelles qui sont recherchées font davantage appel à la conscience personnelle, à la liberté, à l'individualité, à tout ce qui naît de l'intérieur, plutôt que ce qui vient de l'extérieur, à coup d'autorité". (1)

Par cette citation, je ne veux pas prôner la désobéissance à l'autorité, ni la discréditer, mais plutôt souligner l'importance de la mutation que nous sommes en train de vivre depuis quelques décades. Pour qui sait observer, malgré les embûches, elle se voit partout. Nous vivons à une époque où, pour survivre pacifiquement, nous avons à concilier les croyances contradictoires qui s'affrontent dans les différents pays. Le spirituel est-il en train de balayer le religieux ? (religieux pris dans son sens négatif et conflictuel ).

En 1948, la déclaration universelle des droits de l'homme, faisait ressortir l'unité de la famille humaine et de sa dignité. Ce qui ne paraissait pas si évident à en juger d'après nos discordes et nos mépris mutuels sur la planète.

À l'une des premières réunions des amitiés judéo-chrétiennes, André Chouraqui déclare: "La coïncidence à laquelle nous aspirons se situe sur le plan humain ... il s'agit avant tout d'abattre les barrières qui nous séparent: nous voulons sortir de nos ghettos, ouvrir nos fenêtres et contribuer à préparer le temps où les hommes se connaîtront et s'aimeront les uns les autres. Ce n'est pas un temps à venir, c'est maintenant ou jamais que nous réaliseront l'amitié humaine. " (2) Et il dit combien les barrières à abattre ont un ancrage profond dans les mentalités. Il travaillera à élargir l'amitié judéo-chrétienne à l'Islam et à l'humanité entière.

C'est maintenant que nous sommes dans cette voie, bien que semée d'embûches. Une religieuse écrivait à André Chouraqui: " Une belle aurore se lève ... pourtant l'unité ne viendra probablement pas de cet échange d'idées ... il y a un mystère d'unité qui se situe bien au-delà de nos pauvres pensées. L'essentiel n'est-il pas de rejoindre ensemble et par le coeur, plus que par la tête, le Dieu unique, à qui il importe peu que nous soyons ceci ou cela, pourvu que l'on adore en esprit et en vérité."

Et Chouraqui de conclure: "Il ne s'agit pas d'inventer une nouvelle religion, mais de s'ouvrir aux grands souffles de l'Esprit également présent dans la Bible hébraïque, le Nouveau Testament et le Coran. Il s'agit d'une conversion profonde des esprits à la Transcendance ... L'école a sa part de responsabilité dans l'enfermement des esprits. L'ère est close ou un homme pouvait, sans risque, s'enfermer dans son ghetto natal. Les religions comparées doivent être systématiquement enseignées dans les écoles laïques. D'autre part, les écoles religieuses devront veiller à ce que l'enseignement de la spiritualité dont elles relèvent ne soit pas dispensé comme si c'était la seule religion au monde. Les dix commandements appartiennent à l'humanité entière."

Le passage difficile, en cette rentrée scolaire dans les écoles québécoises, de l'enseignement confessionnel à un enseignement des grandes Traditions spirituelles de l'humanité, pourra favoriser l'ouverture souhaitée. Ce qui ne supprime en rien l'approfondissement personnel de sa propre foi. Il reste que, chez les parents, on sent une inquiétude. Une grande confiance à un mouvement universel qui nous dépasse, ne doit-il pas les aider à entrer dans la mutation ?

(1) Roland Leclerc, dans un article du 6 février 2000
(2) André Chouraqui dans "Les dix commandements aujourd'hui"