mercredi 26 juillet 2006

Croire ou ne pas croire

J'écoutais dernièrement à la TV un débat d'auteurs. Certains se disaient 'croyants', d'autres 'non-croyants'. Qu'est-ce que signifient ces dénominations ?

"Lorsque nous nous permettons de diviser les gens entre croyants et non-croyants, nous supposons qu'ils partagent tous une commune image de Dieu et qu'ils divergent seulement en affirmant ou niant son existence" (N.Provencher)

Le même auteur cite un peu plus loin ce mot de Proudhon:"On devient athée,quand on se découvre meilleur que le Dieu auquel on croyait". Oui, il est temps alors de rectifier notre pensée sur Dieu !

On a pu dire avec raison que le mot 'Dieu' était un "mot valise", c'est-à-dire une sorte de "fourre-tout". Un mot dans lequel on projette à peu près toutes les pensées, les imaginations, que nous pouvons avoir sur Dieu. Et en son nom, on tue, on massacre... On justifie facilement toutes ces atrocités. Puisque "Dieu le veut", comment pourrions-nous ne pas le vouloir nous aussi ? L'actualité ne manque pas de l'illustrer.

Je peux avoir honte de me dire croyant. Je préférerais davantage me dire athée, si je ne précise pas davantage en quel Dieu je crois, et ce qu'il est.

Il est vrai qu'il est difficile de dire ce qu'est Dieu ! C'est pour cela sans doute que certains ont préféré dire ce qu'il n'est pas. C'est ce qu'on a appelé la "théologie négative". On peut cependant affirmer des choses positives sur Dieu. C'est ce que l'on voit dans l'évangile, quand le Christ affirme: "Qui me voit, voit le Père" (Jean 14, 9) Souvent, et discrètement, par ses gestes et ses paroles, le Christ s'identifie à Dieu. A ce Dieu dont Saint Jean dira "qu'il est Amour". Et il précisera que "celui qui demeure dans l'Amour, demeure en Dieu, et Dieu demeure en lui".

samedi 15 juillet 2006

Voie sans issue ?

Cul de sac, voie sans issue ! En dehors des rues auxquelles on attribue ces qualificatifs, y a-t-il des situations dans la vie que l'on puisse dire "sans issue". Peut-il y avoir, par notre faute ou celle des autres, des événements contraignants qui nous acculent à une impasse où tout demeure fermé, sans issue possible; à un tunnel sans fin ?

C'est bien le sentiment que ressentent certaines personnes qui ont vécu un échec, une trahison, une erreur ou faute grave, personnelle ou non, mais irréparable, ou n'importe quelle autre situation douloureuse qui porte à s'écrier: impossible de m'en sortir, c'est bel et bien fini, plus d'espoir, plus de raison de vivre !

Terrible conclusion qu'il ne m'est pas permis d'accepter. Il y aura toujours une brèche dans l'impasse, une lueur dans la nuit, une perche de salut. Souvent à peine visible, elle me sera tendue dans l'épreuve. Grâce à la nuit, je verrai la petite lueur; grâce au péril, je saisirai la perche.

Mais encore faut-il vivre ces obscurités, avec les "yeux levés vers Celui qui est au ciel" (ps.122). C'est bien du moins ce que je crois pouvoir observer chez ceux et celles qui sont passés par là; qu'ils soient des "mystiques" reconnus et auréolés après leur mort, ou bien tout simplement des gens "ordinaires" comme nous, tout aussi mystiques peut-être, mais qui passent inaperçus dans leur "ordinaireté".

"Celui qui est au ciel" pourrait aussi être compris comme "le beau, le vrai, le bien". Le Christ n'a-t-il pas dit qu'il était la Vérité, la Vie, le Chemin ? Toutes choses qui convergent vers le même sommet. Autre façon de le nommer.

La foi chrétienne nous dit clairement que nous sommes dans un monde qui nous malmène, "Vous aurez à souffrir dans le monde" (Jn.16,33), dans ce monde que les hommes ont fabriqué, qu'ils fabriquent encore, qui n'est pas celui de Dieu, et qui est mené par "Le Prince de ce monde" dit l'évangile de St Jean (12, 31), c'est-à-dire ce monde de l'histoire. Cela, bien sûr, n'empêche pas d'y être heureux; ou du moins, entre deux "obcurités".

Ce monde est un "monde d'exil", précise l'Écriture. Donc, il y en a un autre, le vrai, celui de l'Éternité (hors de ce temps) et de l'Infini (hors de notre espace). Il faut cesser de lire l'Écriture avec nos vues humaines et logiques, mais avec "un regard métaphysique". C'est ce que nous disent les bons théologiens à la suite de Jean-Paul II. (Foi et Raison)

jeudi 13 juillet 2006

Un enchaînement d'imprévisibles

Matinée de kayak, hier, au Lac à l'Eau Claire, en Mauricie, près de St. Alexis des Monts. De bonne heure, dans la brume du matin, nous glissions en silence sur l'eau vers de nouvelles baies. Plaisir de la découverte.

Près du kayak, de temps en temps, émergeait du lac un huard, suivi de sa marmaille en train de se faire éduquer à plonger et à réapparaître cent mètres plus loin. Une presqu'île rocheuse apparaît. Qu'y a-t-il autour ? On s'approche. Des oiseaux pépient . Ils ont l'air de se moquer de nous, gens de la ville qui n'y connaissent rien à leur environnement et à leur science de la nature. Je les envie de vivre dans un si beau site, mais d'un autre côté, je les plains en projetant sur eux mon inquiétude au sujet de la nourriture et de l'hiver rigoureux qui les attend. Ils n'ont pourtant pas l'air de s'en inquiéter et semblent me dire: si tu savais comme on ne pense pas comme toi !

Tout à coup, un bruissement d'ailes au- dessus de ma tête. Tiens ! Un gros oiseau de proie. Il va se percher au sommet d'un conifère. Merveilleux ! C'est un aigle à tête blanche. Assez proche, il a eu droit à quelques photos. J'en avais déjà vus lors d'un voyage en Alaska, mais ici, si proche de chez nous, plutôt rare ! Les changements climatiques en seraient la cause.

Ainsi, nos coups de pagaies nous emmènent vers ces découvertes inattendues. Tout est surprise. Et cela me rappelle cette prière de Madeleine Delbrêl: " Seigneur, fais-nous vivre notre vie, non comme un jeu d'échec où tout est calculé... mais comme une fête sans fin où ta rencontre se renouvelle... Comme un bal, comme une danse, entre les bras de ta grâce, dans la musique universelle de l'amour" .

Que d'événements surprises, de rencontres apparemment fortuites, de "petits coups de pagaies" qui nous ont conduits vers les événements importants de notre vie. Quelquefois, il aurait suffi d'une bagatelle pour ces petites choses n'aient pas eu lieu.

Laissons-nous mener par cet enchaînement d'imprévisibles, par la science du vent qui souffle !

lundi 10 juillet 2006

Maître et esclave

Je reviens sur le sujet. En écrivant un texte, il me paraît souvent clair. En le faisant relire à d'autres, ou en me relisant moi-même le lendemain, cette clarté évidente disparaît. Et me voici plein de doutes !

Esclavage, dépendance, sont des termes bien péjoratifs. Ce n'est pas sans raison. Malgré cela, ils peuvent signifier avec force une réalité spirituelle positive. Leur usage est évidemment métaphorique. La relation étroite qui unit l'esclave à son maître devient honorifique lorsque ce maître est Dieu, et qu'il se définit l'Amour !

Dans la bible, Saint Paul transforme une relation de dépendance esclave-maître, en une relation d'amour fraternel. Abolition de l'esclavage avant la lettre. Nous trouvons cela dans l'épitre à Philémon, la plus courte de ses lettres connues. On l'appelle quelquefois "billet à Philémon" .

En voici le résumé:
Onésime est un jeune esclave qui, sans doute après avoir commis quelque faute, s'enfuit de chez son maître, philémon. Ils se réfugie auprès de Paul qui se trouve à Rome. Onésime se convertit au christianisme et un lien d'affection se lie entre les deux hommes. La situation est délicate, car Paul connaît Philémon, et se fait ainsi complice d'une infraction, d'une évasion. De plus Onésime risque d'être poursuivi et ramené de force à son maître qui peut le punir sévérement. Paul va donc le renvoyer à Philémon. Mais, et tout l'intérêt de cette histoire est là, Paul envoie en même temps une lettre pour lui demander d'accueillir son esclave fautif non seulement comme un "frère bien-aimé" mais, plus encore, comme si c'était Paul lui-même.

Nous avons aussi cette prière qu'est le psaume 123 (122), qui nous montre notre dépendance à Dieu avec la même image de l'esclave. On ne l'utiliserait plus aujourd'hui, mais mille ans avant le Christ, cela peut se comprendre. Le voici:

Vers toi, j'ai les yeux levés, vers toi qui es au ciel.
Comme les yeux de l'esclave vers la main de son maître,
comme les yeux de la servante vers la main de sa maîtresse,
nos yeux levés vers le Seigneur notre Dieu, attendent sa pitié.

Ce n'est évidemment pas une apologie de l'esclavage. Mais une image de ce qu'est la créature qui reçoit tout, l'être, la vie, et sa liberté même, de son créateur.

vendredi 7 juillet 2006

Liberté dans la dépendance

Y a-t-il une contradiction ? Apparemment oui. Si je suis dépendant, je ne suis pas libre. L'esclave dépendant de son maître, ne fait pas ce qu'il veut; et il en souffre. Le drogué dépendant de sa drogue n'est pas libre; et il en souffre aussi, même s'il se drogue pour moins souffrir.

Ces sujets contradictoires sont bien intéressants pour ceux qui aiment penser ! Pour d'autres il sont inutiles. Bien que je ne me classe pas dans la catégorie des penseurs, je vais quand même continuer ma réflexion sur le sujet: liberté et dépendance sont elles compatibles ?

Bien sûr, je ne considère pas ici la liberté de mouvement, mais la liberté prise dans son sens moral et spirituel. Ainsi, on a pu dire qu'on pouvait être parfaitement libre entre les murs d'une prison. "Amnistie Internationale" nous donne bien des exemples de personnes qui acceptent la prison pour la liberté des autres. Tous ces gens étaient libres, c'est-à-dire capables de faire "l'action juste". Ils avaient acquis (ou avaient reçu, d'en-haut !) la liberté de vouloir ce qu'ils avaient à faire; et non pas, de faire ce qu'ils voulaient !

Nous sommes des êtres libres, mais notre liberté est en dépendance, c'est-à-dire en union étroite, avec celui qui est la source de notre liberté véritable.

mercredi 5 juillet 2006

La mort est-elle inscrite dans notre nature ?

Je disais précédemment: "tout ce qui naît, meurt; tout ce qui commence, finit". Nous avons une date de naissance, nous aurons une date de notre fin. Donc, première réponse: Oui, la mort est inscrite dans notre nature. Cela semble bien incontestable.

Et pourtant, chose assez bizarre, est-ce que nous l' acceptons facilement ? En ce qui me concerne, non ! Par contre, mon vieux cousin et ami, à qui j'avais fait connaître ma foi à ce sujet (à sa demande), me répond: " Je ne crois pas qu'après la mort il y ait autre chose; c'est bien fini pour toujours...! " Je trouve bon qu'il me dise courageusement sa pensée au moment où son espèrance de vie n'est plus très longue. Il a 92 ans ! Malgré cela, il a des sentiments un peu contradictoires, comme le désir de revoir les défunts qu'il a connus et aimés.

Je continue maintenant le livre de la Sagesse cité dans le message précédent: "La puissance de la mort ne règne pas sur la terre, car la justice est immortelle. Dieu a crée l'homme pour une existence impérissable, il a fait de lui une image de ce qu'il est en lui-même" Sag. 1.
De toute évidence, il ne s'agit pas de la même mort... car enfin, comment la nier ? Il y en aurait donc une autre, différente de cette mort physique par laquelle nous passons tous ? Une autre mort qui serait la perte d'une vie éternelle possible ?

On dira: "Ce que l'homme ne conçoit pas, il ne peut s'empêcher, sous des formes trompeuses, de le rêver". On retrouve, dans la pensée antique, l'univers religieux, mais peu d'espérance en ce qui concerne l'au-delà.

La foi chrétienne a des affirmations claires: Le Christ est Dieu fait homme, et "Dieu s'est fait homme pour que l'homme devienne Dieu" (Saint Athanase). "Dieu est devenu mortel avec nous, pour que, avec lui, nous soyons immortels" (Saint Augustin). Cette idée se retrouve très souvent depuis le début du christianisme. Le Christ nous a frayé la voie de l'éternité. Il le fait en nous divinisant, en rendant notre nature humaine immortelle.

Certains disent: "Ce qui nous est proposé là par la foi est trop beau pour être recevable", et encore: "Pareille description de l'homme semble en effet trop haute pour nous. Il arrive même qu'elle nous soit importune". On se contenterait donc plus facilement d'un bonheur plus humble, plus à notre portée.

Et pourtant les théologiens nous disent: "L'homme passe (c'est-à-dire dépasse) l'homme, et nous demeurons enfermés dans le cercle borné de nos désirs humains". Henri de Lubac ajoutera: "Nous ne savons pas ou nous ne voulons point découvrir ce vide capable de s'agrandir à mesure qu'y est versée la Plénitude". Bien dit !

Voilà, au niveau de la foi, des éléments de réponses. Il y en a bien d'autres, mais d'abord faut-il bien digérer ceux-là...

dimanche 2 juillet 2006

Qui donc a fait la mort ?

" Dieu n'a pas fait la mort, il ne se réjouit pas de voir mourir les êtres vivants. Il a crée toutes choses pour qu'elles subsistent; ce qui naît dans le monde est bienfaisant, et l'on n'y trouve pas le poison qui fait mourir..." Livre de la Sagesse 1

Alors, pourquoi meure-t-on ? Triste réalité ! Nous sommes faits pour vivre, et vivre pleinement. Est-ce que le pleinement implique aussi l'éternellement ? Nuance importante. Sinon, profitons de la vie: mangeons et buvons, et puis... Mourons ! C'est un peu, semble-t-il, la devise de beaucoup. Boire, manger, mourir... de toute façon, il faut le faire ! Mais que de différences il y a dans les façons de le faire ! C'est pour cela que je disais, en citant K. G Durckheim, "celui qui ne vit pas avec sa mort, ne vit pas du tout..." (Cf. L'irréversible inévitable).

Il faut bien essayer de répondre à la question: pourquoi meure-t-on ? Si la bible est pour nous une source fiable, nous avons déjà un élément de réponse: Dieu n'a pas fait la mort...

D'autre part, la simple observation du monde de la nature nous montre que tout ce qui naît meurt. Nous connaissons tous notre date de naissance, d'autres sauront un jour la date de notre mort. Et chaque année, nous passons sur la date de notre mort sans le savoir. J'ai le privilège de savoir ce que mon père et ma mère ne savaient pas. Il est mort le 22 mars 1987 et elle est morte le 19 avril 1990. Que d'angoisses ils ont épargnées en ne sachant pas la date de leur mort ! Et je ne voudrais pas connaître la mienne, moi non plus ! Pourtant je crois qu'il y a une vie éternelle et que là, je reverrai et mon père et ma mère.

On reproche quelquefois aux chrétiens de ne pas être plus sereins face à la mort. Eh, bien oui ! C'est comme ça ! Je ne voudrais pas cependant mourir trop tard, c'est-à-dire trop vieux ! Je suis un peu épicurien, je cherche à souffrir le moins possible... Je vois que je n'ai encore pas répondu au titre de ce message: qui donc a fait la mort ? Je ne prétends pas y répondre en savant ou en sage. je n' ai pas d'autre réponse que celle de la foi. Le sujet reviendra sur le tapis !